Les aidants sont toutes les personnes qui accompagnent au quotidien un proche dans une situation de maladie chronique ou d’handicap physique ou mental. Les aidants peuvent être un conjoint, un membre de la famille ou du voisinage.
Rencontre avec Martine, 65 ans, qui aide sa fille Adeline depuis bientôt 30 ans :
« Ma fille Adeline, 34 ans ce mois-ci, a un retard psycho-moteur important depuis son jeune âge quand elle a fait un arrêt respiratoire suite à une bronchiolite. Pendant un court instant son cerveau n’a pas été irrigué. La bronchiolite est une infection virale respiratoire contagieuse qui touche les bronchioles, en d’autres mots les premières branches des voies respiratoires. Elle se traduit par un simple rhume avec une légère fièvre au départ et peut s’aggraver rapidement en provoquant une gêne respiratoire et des difficultés d’alimentation. Depuis Adeline ne parle pas, elle manque de dextérité et d’équilibre, elle souffre également de tremblement surtout le matin.
Adeline est ma deuxième fille, c’est une bonne vivante comme moi ! Elle est affectueuse et sociable, elle aime la musique, les puzzles, regarder ses comédies musicales préférées comme Grease et depuis peu le coloriage.
Adeline vit en Maison d’Accueil Spécialisée la semaine, je m’occupe d’elle un week-end sur deux à la maison mais aussi parfois le mercredi en fin d’après-midi jusqu’au jeudi matin.
Racontez-nous votre quotidien
Je compense le manque d’autonomie de ma fille par une assistance tout au long de la journée. Dès le matin je l’aide à se laver, s’habiller et se brosser les dents. Il faut aussi lui couper sa viande car cela lui est difficile de le faire seule. Je la surveille aussi lorsqu’elle va dehors car je redoute une chute, avec son manque d’équilibre, c’est fréquent.
Mais mon quotidien n’est pas seulement rythmé par ces tâches, nous allons au cinéma, au restaurant, nous sommes aussi parties fin août en vacances avec d’autres amies. Nous partageons de vrais moments de complicités toutes les deux.
Quelles sont vos principales difficultés ?
J’ai quelquefois du mal à me faire obéir. Adeline a du caractère et il lui arrive de refuser de suivre mes indications. Il y a des instants pénibles en public lorsqu’Adeline décide de taper sur la table par exemple pour montrer son mécontentement. Dans ce cas il ne faut jamais s’énerver, même si c’est dur, car cela empire toujours la situation. Ces moments sont assez usants.
Il est difficile également de ne pas avoir peur du regard des gens, j’en souffrais beaucoup au début du handicap d’Adeline. Mais avec le temps j’ai remarqué, avec soulagement, que les personnes que je croise sont de plus en plus sensibles et acceptent plus facilement le handicap d’Adeline. Il y a quelques années encore, personne ne me laissait passer en première avec ma fille à la sortie d’un cinéma, maintenant le regard change et c’est agréable de se sentir plus soutenue et comprise.
Êtes-vous aidée en tant qu’aidante ?
Adeline est entourée par une équipe dans une Maison d’Accueil Spécialisée (MAS). L’établissement l’accompagne pour les gestes de la vie courante et prévoit des ateliers et des activités physiques pour la stimuler au quotidien avec tous les autres pensionnaires, selon leurs aptitudes. Adeline fait de l’équitation tous les 15 jours !
Je m’occupe généralement seule d’Adeline, mais ma première fille est aussi présente et prend soin de sa sœur lorsque je m’absente. Je peux aussi compter sur mes voisines et mes amies qui nous accompagnent lorsque nous nous promenons.
Avez-vous des conseils à donner aux autres aidants ?
Il faut garder du temps pour soi ! Au début de ma retraite j’ai eu l’opportunité en tant qu’ancienne infirmière de retourner en clinique quelques jours par semaine pour aider mes collègues et continuer à faire ce que j’aime. Mon travail, le contact avec les patients et l’ambiance du service me manqueraient beaucoup si j’arrêtais complètement mon activité.
Je suis convaincue qu’il est important de se ménager sans culpabiliser. Je pourrais m’occuper d’Adeline plus souvent mais je sais qu’il faut que je garde du temps pour moi et mes loisirs. Ainsi je suis certaine de passer de bons moments avec ma fille. Il ne faut pas avoir peur de se faire aider selon sa situation, c’est normal d’avoir besoin de se reposer ou d’aller chez le coiffeur.
Mon deuxième conseil serait de ne pas arrêter de « vivre normalement », il faut absolument continuer de profiter des plaisirs simples comme aller au restaurant, se rendre à une exposition, ou bien se promener au marché. »